Pollution : les cours d'eau sont-ils plus contaminés en campagne que dans les villes ?

Selon un rapport du WWF, les cours d'eau ruraux sont de plus en plus pollués alors que les rivières circulant dans les villes et agglomérations observent au contraire une nette amélioration de leur santé écologique.

Algues vertes
Les algues vertes sont de plus en plus nombreuses dans les rivières, notamment dans le milieu rural français. Celles-ci se forment grâce à un excès de nutriments engendré notamment par la pollution agricole.

Un récent rapport du WWF à l'occasion de la journée mondiale de la biodiversité ce 22 mai a dressé un état alarmant des cours d'eau et plan d'eau douce en France. Les cours d'eau ruraux sont en effet de plus en plus dégradés tandis que les rivières en ville affichent à l'inverse une bonne santé écologique.

De fortes disparités entre la ville et le milieu rural

Selon le WWF, un déclin de 0,4% des populations de poissons et d'oiseaux des cours d'eau français a été observé sur les 20 dernières années. À première vue, ce chiffre ne semble pas très inquiétant, étant plutôt signe d'une stagnation qui se veut plutôt rassurante, mais il l'est toutefois bien plus en prenant en compte le fait que 500 milliards d'euros ont été déployés sur la même période pour assurer la préservation de ces populations.

Comme l'évoque le directeur des programmes du WWF France Yann Laurans, il y a donc « quelque chose qui cloque » quand on constate l'écart entre l'important effort financier mis en jeu et les maigres, trop maigres résultats obtenus. Toutefois, ce léger déclin des populations se traduit d'après le rapport du WWF par d'importantes disparités entre la ville et le milieu rural.

En effet, l'ONG constate un véritable effondrement de la qualité des petits cours d'eau dans le milieu rural, dû notamment à une politique d'intensification des pratiques agricoles et d'artificialisation depuis maintenant 70 ans. Une qualité des cours d'eau qui se répercute malheureusement sur la faune les fréquentant.

À l'inverse, la qualité des eaux des grands fleuves s'est au contraire grandement améliorée depuis environ une soixantaine d'années, notamment grâce aux progrès des systèmes d'assainissement et aux stations d'épuration. Dans la Seine par exemple, on retrouve environ 6 fois plus d'espèces de poissons au niveau du pont de l'Alma à Paris que dans les années 60 !

Une dégradation liée à l'agriculture

Le constat est malheureusement loin d'être bon à l'échelle de la France puisque, selon les chiffre de l'agence de l'eau, moins de la moitié des rivières étaient en bon état écologique en 2019 (43,1%). En cause la multiplication des sources de dégradation liées aux activités humaines comme les barrages, les dragages et canalisations, les prélèvements excessives et les rejets de pesticides, d'engrais ou de polluants industriels.

De nombreuses contaminations sont aujourd'hui liées aux pratiques d'agriculture intensive. Par exemple, le WWF dénonce que le recours au pesticides n'a pas baissé dans l'agriculture, les indicateurs d'évolution des usages des produits phytosanitaires étant au même niveau qu'en 2009. En conséquence, l'état chimique des masses d'eau superficielles ne s'est amélioré que de seulement 1% en l'espace de 10 ans.

L'usage des pesticides dans les champs et l'accumulation de nitrates dans les élevages entraîne une mauvaise santé écologique des cours d'eau sur de nombreuses régions où l'agriculture est importante. C'est par exemple le cas en Bretagne, là où les rejets des élevages intensifs ont entraîné un développement massif des algues vertes dans les cours d'eau, puis jusque sur les plages.

Pour améliorer la situation actuelle, le WWF se concentre notamment sur la préservation des zones humides en France en s'apprêtant par exemple à dépenser 5 millions d'euros dans ces zones en France métropolitaine, espérant pouvoir augmenter cette mise de départ en attirant des financements de l'État, de fondations ou autres. L'ONG appelle également les pouvoirs publics à lancer un plan de restauration des cours d'eau et une réévaluation de la fiscalité de l'eau, afin d'appliquer le principe pollueur-payeur à cette ressource si importante.

Enfin, l'ONG souligne l'importante d'adapter le secteur agricole en soutenant une agriculture économe en eau et en s'appuyant sur des solutions fondées sur la nature. Une recommandation primordiale qui tombe d'ailleurs au moment où le projet de loi d'orientation agricole est en passe d'approuver un recul non-négligeable sur l'agriculture écologique dans notre pays.

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