Pourquoi la disparition des papillons de nuit, menacés par la pollution, est-elle si dramatique ?

La pollution atmosphérique menace aussi l'existence-même des papillons de nuit. Leur disparition serait une véritable épée de Damoclès pour la biodiversité. Pourquoi ? Quel est ce polluant si néfaste pour ces insectes nocturnes ?

Papillon de nuit
Ce polluant atmosphérique particulièrement présent la nuit réduit la capacité des pollinisateurs, comme les papillons de nuit, à traquer les odeurs des fleurs.

Encore un danger de plus pour notre biodiversité : une étude publiée le 8 février dernier dans la revue Science et réalisée par une équipe de chercheurs aux Etats-Unis révèle que le processus de pollinisation, notamment réalisé par les papillons de nuit, est menacé par la pollution atmosphérique. Comment l'expliquer ? En quoi la disparition de ces insectes nocturnes est-elle dramatique ?

Le radical nitrate, un véritable poison !

On connaissait déjà le terrible impact de la pollution atmosphérique sur les insectes pollinisateurs diurnes, qui butinent en pleine journée, comme les abeilles. L'apport de cette nouvelle étude est de montrer qu'un polluant, particulièrement présent dans l'air la nuit, réduit fortement la capacité des insectes pollinisateurs nocturnes, comme les papillons de nuit, à butiner.

Ce polluant, c'est le radical nitrate (NO3) : il se forme lorsque le dioxyde d'azote issu de la combustion des énergies fossiles (mais aussi des feux de forêt) rencontre l'ozone de l'atmosphère. Contrairement à ces deux autres gaz, le radical nitrate est rapidement dégradé par la lumière solaire, d'où sa présence bien plus importante la nuit.

La présence de ce polluant dans l'atmosphère empêche les pollinisateurs nocturnes de reconnaître les odeurs florales, ce qui perturbe à la fois leur capacité à se nourrir et le processus de pollinisation. Une pollution atmosphérique qui s'ajoute par ailleurs à la pollution sonore et lumineuse provoquée par les activités humaines.

70 espèces de pollinisateurs en danger !

Ces résultats ont été observés via l'étude de l'onagre pâle, une fleur sauvage que l'on trouve dans les régions arides de l'Ouest des Etats-Unis, et dont l'odeur attire particulièrement certains papillons de nuit. Ces derniers utilisent leurs antennes pour détecter le pollen à plusieurs kilomètres de distance. Le problème, c'est qu'en présence de radical nitrate, les composants chimiques du parfum de cette fleur voient leur concentration chuter drastiquement !

En réalisant une expérience dans un couloir de vent avec une fausse fleur, les scientifiques ont observé qu'en l'absence de radical nitrate, les papillons de nuit volent contre le vent pour accéder au pollen et ainsi se nourrir ! En revanche, en présence du polluant, l'attraction à la fleur diminue voire s'éteint complètement... Un effet visible la nuit et beaucoup moins important en pleine journée.

Cette pollution atmosphérique est donc particulièrement inquiétante, à l'heure où l'existence de 75% des plantes à fleurs dépend de l'activité des insectes pollinisateurs, et où plus de 70 espèces d'insectes sont en danger ou menacées...

Entre émissions naturelles de radical nitrate et émissions liées aux activités humaines, les chercheurs ont déterminé quelles étaient les régions où les niveaux de NO3 pourraient rapidement atteindre un niveau critique pouvant déstabiliser la pollinisation et conduire à la disparition des papillons de nuit : il s'agit de l'Europe, du Moyen-Orient, de l'Asie Centrale et du Sud et du Sud de l'Afrique.

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