Insolite : et si des crabes étaient capables de recycler du plastique ?

Selon une récente étude, une espèce de crabes violonistes pourrait ingérer et même digérer des plastiques dans le golfe d'Urabá, en Colombie.

Crabe
Une espèce de crabe violoniste s'est adaptée à un environnement hautement pollué aux plastiques

Des scientifiques ont découvert une population de crabes violonistes très spéciale dans l'une des mangroves les plus polluées au monde en Colombie. Ces crabes seraient en effet capables d'ingérer et de décomposer des microplastiques !

Des crabes évoluant dans un environnement très pollué

La pollution plastique est un véritable fléau à travers le monde. C'est notamment le cas dans le golfe d'Urabá, en Colombie, où les niveaux de contamination au plastique sont parmi les plus élevés du globe. Néanmoins, cela n'empêche pas aux crabes de prospérer dans cette région, principalement le crabe violoniste.

Ce crabe tient son nom de sa capacité à générer une large gamme de sons en frottant ses pinces et ses pattes. Celui-ci a également obtenu le qualificatif « d'ingénieur de l'écosystème » grâce aux trous qu'il creuse dans le sol, qui participent à son oxygénation. Selon une récente étude scientifique, cette espèce aurait également un rôle dans la dégradation des microplastiques issues de nos déchets.

Des chercheurs internationaux ont en effet cherché à comprendre l'effet des microplastiques sur les animaux présents dans le golfe d'Urabá en se concentrant sur les nombreuses populations de crabes violonistes présentes sur le secteur. Ceux-ci ont ainsi sélectionné cinq parcelles d'un mètre carré de mangrove urbaine et ont pulvérisé 100 millilitres de solutions contenant des microsphères de polyéthylène (un type de plastique très abondant) marquées par fluorescence rouge et verte.

Les scientifique sont ensuite répété ce processus durant 66 jours, avant de prélever des échantillons de sols et 95 crabes. Les résultats de l'étude, publiés le 17 décembre dernier dans la revue Global Change Biology ont permis de mettre en évidence que les concentrations de microplastiques étaient 13 fois supérieures dans l'organisme des crabes que dans les sédiments.

Une utilité pour le traitement des microplastiques ?

Les chercheurs savaient déjà que les crabes violonistes possèdent un régime alimentaire varié et que ceux-ci pouvaient ingérer du plastique en laboratoire. Néanmoins, ceux-ci ne savaient pas si cette particularité se retrouvait également dans un milieu naturel.

Les résultats de l'étude ont montré que ces crabes étaient bien capables d'ingérer mais également de digérer le plastique présent dans la nature. En effet, de nombreux microplastiques se sont fragmentés davantage dans l'organisme des crabes, un processus qui pourrait être favorisé par le système digestif spécialisé de l'animal associé à des bactéries dégradant le plastique.

Toutefois, pas de solution miracle à la question de la pollution aux microplastiques à travers le monde. En réalité, le plastique ne disparaît pas totalement, celui-ci ne fait que changer de taille, ce qui pourrait s'avérer plus contre productif qu'autre chose. Selon les auteurs de l'étude, ce « recyclage » naturel a pour effet de libérer des nanoplastiques tout aussi nocifs dans les tissus des crabes, et donc dans le reste de la chaîne alimentaire.

Ces résultats sont donc plutôt inquiétants, même si ceux-ci permettent de mieux comprendre comment les animaux s'adaptent à la pollution et aux pressions anthropiques. Néanmoins, si les crabes se sont « adaptés » à ces plastiques, ce ne sera peut-être pas le cas de toutes les espèces s'en nourrissant et ingérant de ce fait des quantités parfois notables de nanoplastiques, en plus des microplastiques déjà présents en grande quantité dans leur environnement...

Référence de l'article :

Les crabes violonistes "recyclent" les microplastiques, mais ce n'est pas sans risque, Geo (24/12/2025), Nastasia Michaels

Beyond Abiotic Decay: Fiddler Crabs Accelerate Plastic Fragmentation in Pollution Hotspots, Global Change Biology, José M. Riascos, Daniela Díaz, et al.