Comment les entreprises peuvent-elles s'adapter à la multiplication des extrêmes climatiques ?

Canicules, inondations, sécheresses… Les extrêmes climatiques se multiplient. Comment les entreprises peuvent-elles transformer ces menaces en leviers d’adaptation et de résilience ?

S’adapter, ce n’est pas simplement se protéger, c’est aussi saisir des opportunités.
S’adapter, ce n’est pas simplement se protéger, c’est aussi saisir des opportunités.

Les extrêmes climatiques ne sont plus de simples anomalies : ils redessinent déjà le quotidien des entreprises. Dans l’Union européenne, les pertes liées au dérèglement climatique atteignent 145 milliards d’euros sur la dernière décennie, selon Eurostat.

Le rapport de la Chambre de commerce et d’industrie (CCI) indique que 70 % des entreprises françaises se déclarent déjà impactées par au moins un risque climatique.

Quels constats ?

En 2023, la France a connu 40 jours de canicule, 81 épisodes de vigilance crue déclenchés par Météo France, un record depuis la mise en place du dispositif en 2001, et plus de 1 000 communes touchées par des inondations.

Dans le Nord et le Pas-de-Calais, 400 entreprises ont été directement touchées par ces inondations et plus d’un millier ont subi des perturbations indirectes. La facture est lourde : la tempête Alex, en 2020, avait déjà coûté plus d’un milliard d’euros de dommages dans les Alpes-Maritimes, tandis que la tempête Kirk, en octobre 2024, a entraîné entre 350 et 420 millions d’euros de dégâts.

En outre, la sécheresse fragilise aussi l’économie. En 2022, presque tous les départements de France métropolitaine ont connu des restrictions d’eau. L’été suivant, près de 80 % du territoire a été placé en restriction de crise, obligeant à limiter fortement les usages non prioritaires. Les conséquences sont directes : les débits des cours d’eau peuvent chuter de 30 à 60 % en été, menaçant à la fois la production agricole, le refroidissement des centrales nucléaires et l’approvisionnement industriel.

Par ailleurs, entre 2015 et 2020, les canicules ont représenté un coût évalué entre 22 et 37 milliards d’euros, dont environ 6 milliards directement liés aux pertes de productivité. Les seuils de risque pour la santé au travail sont clairs : au-delà de 28 °C, les salariés travaillant en extérieur sont exposés ; à 30 °C, ce sont les emplois de bureau qui sont touchés ; et à 33 °C, la santé des travailleurs est mise en danger. Ces épisodes entraînent fatigue, accidents, absentéisme et ralentissement des activités.

Notre pays se trouve ainsi particulièrement exposé : notre climat s’est réchauffé de +1,7 °C depuis l’ère préindustrielle, contre +1,2 °C à l’échelle mondiale. Les experts de Météo France rappellent que chaque degré supplémentaire agit comme un multiplicateur d’événements extrêmes, augmentant leur fréquence et leur intensité.

Comprendre le risque pour mieux agir

Le premier pas vers l’adaptation consiste à évaluer les vulnérabilités spécifiques de chaque activité. Une PME de l’agroalimentaire ne sera pas exposée de la même façon qu’une entreprise logistique. Les risques identifiés vont des ruptures d’approvisionnement liées aux sécheresses agricoles, aux pénuries d’eau pour les sites industriels, en passant par les dégâts matériels dus aux tempêtes.

L'adaptation climatique ne signifie pas uniquement protéger ses bâtiments. Elle inclut aussi la diversification des sources d’énergie, la sécurisation des chaînes logistiques et la réorganisation du travail, par exemple, en ajustant les horaires pour éviter les pics de chaleur.

L’adaptation ne peut pas être portée par les seules entreprises. Les collectivités, l’État, mais aussi les consommateurs jouent un rôle clé.

La planification territoriale devient essentielle : zones d’activités hors des zones inondables, infrastructures plus sobres en eau et soutien aux filières locales pour réduire la dépendance aux importations fragiles.

Des stratégies d'adaptation déjà à l'oeuvre

Certaines entreprises montrent la voie. Dans le secteur du bâtiment, de plus en plus d’acteurs intègrent des matériaux résilients à la chaleur et des systèmes de ventilation naturelle. Les industries fortement consommatrices d’eau testent des procédés de recyclage des eaux usées. Les entreprises de transport, elles, investissent dans des infrastructures moins vulnérables aux inondations.

Les entreprises ont également tout intérêt à associer leurs salariés à cette démarche : former, sensibiliser et favoriser l’innovation interne. Car une organisation résiliente est d’abord une organisation qui sait mobiliser l’intelligence collective.

Le rapport rappelle que chaque euro investi dans la prévention permet d’économiser jusqu’à 7 euros en réparation des dommages. Autrement dit, l’adaptation n’est pas une charge, mais bien un levier de compétitivité et de durabilité.

Référence de l'article

CCI France. (2025, février). Adaptation des entreprises au changement climatique : Agir maintenant ! Rapport de restitution.