Biodiversité et climat : l'Europe en alerte, et la France dans tout ça ?

L’Europe réduit ses émissions et mise sur les renouvelables, mais sa biodiversité s'effondre, ...et la France ? Le dernier rapport de l’Agence européenne pour l’environnement rappelle que rien n’est encore gagné.

Un bouquetin des Alpes aux cornes courbées se tient avec confiance sur une falaise de montagne à Chamonix, France
Un bouquetin des Alpes aux cornes courbées se tient avec confiance sur une falaise de montagne à Chamonix, France.

Cinq ans après son précédent rapport, l’Agence européenne pour l’environnement (AEE) remet les pendules à l’heure : l’Europe progresse sur le climat, mais recule sur l’état de son environnement.

Depuis 2005, l’Union européenne a réduit ses émissions de gaz à effet de serre, diminué sa consommation de combustibles fossiles et doublé la part des énergies renouvelables dans son mix énergétique. La qualité de l’air s’est améliorée, les déchets sont mieux recyclés, et l’économie verte génère désormais des milliers d’emplois.

Toutefois, ces progrès, aussi notables soient-ils, ne compensent pas la dégradation accélérée de la biodiversité, la raréfaction des ressources en eau et les impacts croissants du changement climatique.

Europe : un laboratoire de réchauffement

L’Europe est aujourd’hui le continent qui se réchauffe le plus rapidement au monde. Les vagues de chaleur extrêmes, les incendies géants, les sécheresses et les inondations spectaculaires en témoignent. Ces phénomènes ne sont plus exceptionnels : ils deviennent structurels.

Leurs impacts sont multiples, menaces sur la santé publique, les infrastructures, la sécurité alimentaire et l’économie.

Même avec des politiques ambitieuses de réduction des émissions, le climat européen continuera d’évoluer. L’AEE appelle donc à accélérer l’adaptation et à renforcer les politiques de résilience, notamment à travers des solutions fondées sur la nature : restauration des forêts, zones humides et littoraux, qui permettent à la fois de stocker le carbone et de protéger la biodiversité.

La France, élève modèle ou retardataire ?

Côté français, les signaux sont contrastés. Oui, les émissions de gaz à effet de serre (GES) ont baissé de 35 % depuis 1990, l’empreinte carbone nationale a baissé de 13 %. Oui encore, la pollution de l’air diminue. Et surtout, la France a franchi un cap symbolique : 31,3 % de son territoire est désormais protégé, dépassant déjà l’objectif européen de 30 % fixé pour 2030.

Malgré cela, le défi demeure immense : espèces menacées, habitats fragmentés, équilibres naturels rompus.

Environ 2 472 espèces menacées à l’échelle mondiale sont présentes sur le territoire français. Parmi elles, 15 % des orchidées, 14 % des mammifères, 24 % des reptiles, 23 % des amphibiens, 32 % des oiseaux nicheurs, 19 % des poissons et 28 % des crustacés d’eau douce. Plus de 33 % des oiseaux communs spécialistes ont disparu entre 1989 et 2017, et 38 % des chauves-souris entre 2006 et 2016.

Autrement dit, la biodiversité française s’érode silencieusement, année après année.

Des politiques ambitieuses...et des reculs préoccupants

Pour y répondre, la France s’est dotée d’un solide arsenal de politiques publiques :

  • la loi pour la reconquête de la biodiversité (2016) ;
  • le Plan biodiversité (2018) ;
  • la Stratégie nationale de la biodiversité (SNB 2030) ;
  • ou encore la stratégie de lutte contre la déforestation importée (2018).

Des plans nationaux en faveur des espèces menacées existent depuis 1996, tandis que les stratégies des aires protégées terrestres et marines progressent.

Le Haut Conseil pour le climat (HCC), dans son rapport annuel publié le 3 juillet 2025, alerte pourtant sur un essoufflement de la dynamique. Il appelle à un véritable « sursaut collectif » pour remettre la France sur la trajectoire de ses engagements.

La loi Duplomb du 11 août 2025, qui a provoqué une vive polémique, autorisait des dérogations pour l’acétamipride, mais le Conseil constitutionnel les a censurées. Une illustration claire des frictions entre économie et écologie.

Réactiver le vivant pour rétablir l'équilibre

Pour Teresa Ribera, vice-présidente exécutive chargée de la transition propre et compétitive au sein de l’UE,

La protection de la nature n’est pas un coût, c’est un investissement dans la résilience et le bien-être des citoyens.

Chaque forêt, chaque zone humide, chaque sol riche en micro-organismes est un mécanisme de résilience que nous ne pouvons ni reproduire ni remplacer.

Investir dans la biodiversité, c’est renforcer la capacité de nos villes, de nos champs et de nos rivières à absorber les chocs climatiques, purifier l’air et l’eau, et maintenir un équilibre qui nous protège tous. La nature est le socle de notre futur.

Références de l'article

Rioux, P. (2025, 3 octobre). Biodiversité, changement climatique : l’état de l’environnement en Europe se dégrade. La Dépêche.

Vie publique. (2025, 25 septembre). Érosion de la biodiversité : quelles réponses pour mieux protéger la nature ?