L'Allemagne va-t-elle réussir sa transition verte sans le nucléaire ?

L'Allemagne abandonne définitivement le nucléaire le 15 avril, après avoir repoussé l'échéance. Des adieux à l'atome malgré la crise énergétique liée à la guerre en Ukraine : les énergies renouvelables seront-elles suffisantes pour l'autonomie en électricité du pays ?

Centrale nucléaire Allemagne
La centrale nucléaire d'Isar 2, en Bavière, sera l'une des trois dernières à fermer en Allemagne le 15 avril prochain.

Clap de fin pour le nucléaire en Allemagne. Les trois derniers réacteurs du pays seront débranchés ce samedi 15 avril : celui du Bade-Wurtemberg, près de Stuttgart et de la rivière Neckar, celui d'Emsland, près de la frontière avec les Pays-Bas, tout comme celui d'Isar 2, en Bavière. Un défi immense pour la première économie européenne, après une date butoir repoussée et de multiples controverses dans le pays. L'Allemagne réussira-t-elle sa transition verte sans le nucléaire, en pleine crise énergétique liée à la guerre en Ukraine ?

Le choc de Fukushima

La décision de sortir du nucléaire, prise en 2002, avait été accélérée par Angela Merkel en 2011, quelques semaines après la terrible catastrophe de Fukushima, au Japon. "Les risques liés à l'énergie nucléaire ne peuvent être maîtrisés à 100%", avait déclaré l'iconique chancelière, dans un pays où l'inconscient collectif était encore marqué par la guerre froide et par l'accident de Tchernobyl. A l'époque, l'opinion allemande était donc plutôt favorable à la mesure.

Mais le début de la guerre en Ukraine en février 2022 a failli tout faire capoter, l'Allemagne décidant de se priver de gaz russe. Les scénarios de black-out électrique, en partant de l'arrêt des usines pour aller jusqu'à l'absence de chauffage en hiver, ont fait douter la population, et par ricochet son gouvernement. La date butoir initialement fixée au 31 décembre 2022 a donc finalement été repoussée au 15 avril 2023 par le chancelier social-démocrate Olaf Scholz (soutenu par les écologistes et les libéraux).

La décision, prise pour assurer la sécurité d'approvisionnement de l'Allemagne, semble satisfaire les autorités locales des communes où subsistaient les derniers réacteurs. Il n'est plus temps de "revenir en arrière", selon elles, même si l'hiver relativement doux a sans doute sauvé les meubles. Les trois dernières centrales nucléaires fournissaient encore 6% de l'énergie produite en Allemagne en 2022, alors que l'ensemble du réseau nucléaire comptait pour 30,8% dans le mix énergétique en 1997.

Jusqu'à 5 éoliennes par jour

Cet abandon du nucléaire est en quelque sorte l'apéritif d'un objectif encore plus ambitieux : celui d'arrêter toutes les centrales à charbon en Allemagne d'ici 2038, dont une grande partie d'entre elles dès 2030. Actuellement, le charbon représente encore plus de 30% de la production d'électricité en Allemagne, notamment à cause d'une hausse de 8 points décidée en 2022 pour compenser l'arrêt des importations de gaz russe.

Reste alors une solution pour assurer l'autonomie énergétique du pays : les énergies renouvelables, dont la part dans le mix de production atteint déjà aujourd'hui 46%, contre 25% en 2012. Mais cette part, bien plus importante qu'en France (14%), ne satisfait pour le moment ni le gouvernement, ni les associations écologistes. Les objectifs de l'Allemagne sont très ambitieux en la matière, et le chancelier Olaf Scholz a déjà prévenu : l'Allemagne va devoir installer "4 à 5 éoliennes chaque jour" dans les prochaines années pour assurer ses besoins. Une marche très haute à franchir, lorsque l'on sait que seules 551 éoliennes ont été posées en 2022.

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