Allergie au pollen : le sexe des arbres aggrave-t-il vraiment nos symptômes au printemps ?
Les allergies au pollen touchent 20 % des enfants dès 9 ans et 30 % des adultes en France, selon le RNSA. Une idée reçue accuse les arbres mâles d'en être le principaux responsables. Vrai ou faux ? Décryptage.

Chaque année, au retour des beaux jours, le nez qui pique, les yeux larmoyants et les éternuements en rafale deviennent le lot quotidien de millions de personnes. Ce phénomène est lié à la pollinisation, processus naturel par lequel les arbres et plantes libèrent leur pollen dans l'air.
Mais une idée particulièrement virale sur les réseaux sociaux pointe du doigt un coupable surprenant : les arbres mâles. Selon certains, ils seraient plantés en surnombre dans les villes, aggravant ainsi les allergies respiratoires. Qu’en est-il vraiment ?
Sexualité des arbres : monoïques ou dioïques ?
Avant de désigner un coupable, il faut comprendre comment se reproduisent les arbres. Contrairement aux animaux, leur sexualité est variée et fascinante.
Plantes monoïques
Les arbres monoïques ont deux organes sexuels, mâle et femelle qui se traduit par des fleurs mâles et des fleurs femelles sur la même plante. On dit alors que ces arbres sont bisexués. C’est le cas du chêne, du noisetier, du pin ou encore du sapin, du cèdre. Chez ces espèces, les fleurs mâles et femelles diffèrent visuellement : par exemple, chez le noisetier, les fleurs mâles forment des chatons allongés, tandis que les fleurs femelles ressemblent à de petits bourgeons avec des stigmates rouges.
Lexplosion des allergies pousse les Japonais à raser leurs forêts !
— Hugo Clément (@hugoclement) March 15, 2025
Au Japon, 40% des habitants sont désormais allergiques au pollen de cèdre. Le pays est donc contraint de raser des centaines de milliers dhectares.
En France, où 30% des habitants sont déjà allergiques au pic.twitter.com/I1ZViGrPqQ
Les arbres hermaphrodites sont des cas particuliers, où les organes mâles et femelles sont sur une même fleur. C’est le cas de nombreux fruitiers comme le pommier (mâle : étamine, femelle : pistil), le cerisier ou le cognassier, mais aussi d’arbres d’ornement tels que le marronnier ou le magnolia.
Plantes dioïques
À l’inverse, certaines espèces sont dites dioïques : chaque individu a son propre sexe, on parle de plantes monosexuées, et il y a par conséquent des arbres mâles et des arbres femelles. Ils dépendent chacun d’un autre individu du sexe opposé pour pouvoir perpétuer l’espèce, et ont donc besoin d’aide pour pouvoir se reproduire, par exemple, ils ont forcément de pollinisateurs, comme les animaux, les insectes ou le vent.
Seuls 6 % des 300 000 espèces de plantes présentent cette caractéristique. Parmi elles, on trouve le ginkgo biloba, le genévrier thurifère, les peupliers et le palmier-dattier. Chez ces espèces, les individus mâles produisent du pollen, tandis que les individus femelles portent les fruits. Cette séparation permet d’éviter la consanguinité et favorise un brassage génétique plus important.
Cependant, la distinction entre mâle et femelle n’est pas toujours figée. Chez le frêne commun, par exemple, on peut rencontrer des arbres mâles, femelles ou bisexués au sein d’une même population.
Attention au "fake news" !
Sur TikTok et Twitter, une idée a circulé à partir de 2021 : les urbanistes planteraient majoritairement des arbres mâles, car ils ne produisent pas de fruits susceptibles de salir les trottoirs. Ce choix, qualifié de "sexisme botanique", serait responsable d'une explosion des allergies.
DOSSIER ECOLOGIE :
— Vérité Diffusée (@VeriteDiffusee) March 15, 2025
️ haya.zana :
"On rappelle très bien que fut un temps, les arbres fruitiers se trouvaient facilement dans la rue.
Ce que j'étais en train de me dire en fait, pourquoi on n'a pas d'arbres fruitiers dans les rues qui peuvent faire pousser des fruits et pic.twitter.com/GCIxhfSwoO
Mais cette théorie repose sur une exagération. L’idée provient d’une observation réelle : dans certaines villes américaines, on a favorisé les peupliers deltoïdes mâles pour éviter les nuisances liées aux graines cotonneuses des femelles. Cependant, cette situation ne s’applique pas à la majorité des espèces d’arbres en ville.
Ces espèces, largement présentes en ville, libèrent d'importantes quantités de pollen. Accuser uniquement les arbres mâles est donc une simplification abusive.
Des solutions pour mieux respirer en ville
Le seul moyen de traiter une allergie au pollen sur le long terme est la désensibilisation, qui consiste à exposer progressivement l’organisme à l’allergène pour qu’il s’y habitue. En complément, des traitements symptomatiques existent, comme les antihistaminiques pour réduire les réactions allergiques, ou encore le lavage du nez avec du sérum physiologique.
Par ailleurs, plusieurs gestes peuvent aider à limiter l’exposition au pollen :
- Aérer son logement en fin de journée, lorsque la concentration de pollen est plus faible.
- Consulter les bulletins polliniques pour anticiper les périodes à risque.
- Porter des lunettes de soleil en extérieur pour éviter le contact du pollen avec les yeux.
- Se laver les cheveux régulièrement, surtout avant de dormir, pour éliminer les particules de pollen.
- Éviter de rouler en voiture avec les fenêtres ouvertes ou de faire du vélo les jours de forte concentration pollinique.
Ne nous trompons pas d'ennemi !
Si les allergies augmentent, ce n’est pas tant à cause du sex-ratio des arbres urbains que du réchauffement climatique. En effet, plusieurs études ont démontré que l’augmentation des températures allonge la saison pollinique et intensifie la production de pollen. Les concentrations de pollen dans l'air ont augmenté de 20 à 30 % en Europe ces dernières décennies.
De plus, la pollution atmosphérique aggrave les symptômes allergiques. Les particules fines issues des émissions de voiture modifient la structure du pollen, le rendant plus allergisant. Ainsi, un même grain de pollen peut déclencher une réaction plus forte en milieu urbain qu’en milieu rural.
Sources de l'article
Gauquelin, T. (2025, 25 mars). Nos allergies au pollen sont-elles liées au sexe des arbres ? The Conversation.
Direction de l'information légale et administrative. (2025, 17 février). Pollens : risques allergiques élevés.
Institut Pasteur de Lille. (2022, 27 avril). Allergies au pollen : que faire pour soulager les symptômes ?