Un phénomène enregistré pour la première fois pourrait expliquer l'origine des trous noirs supermassifs

James Webb a enregistré un événement qui pourrait expliquer comment les trous noirs supermassifs sont apparus dans l'Univers.

L'objet observé par James Webb est devenu la galaxie de l'infini en raison de sa forme particulière. Il pourrait répondre à l'une des principales questions de l'astronomie : comment se forment les trous noirs supermassifs ? Crédit : NASA/JWST
L'objet observé par James Webb est devenu la galaxie de l'infini en raison de sa forme particulière. Il pourrait répondre à l'une des principales questions de l'astronomie : comment se forment les trous noirs supermassifs ? Crédit : NASA/JWST

En 2021, le télescope spatial James Webb a été lancé avec pour mission de répondre à certaines des grandes questions encore ouvertes en astronomie. Les principales consistaient à observer les premières galaxies de l’Univers afin de comprendre comment elles se sont formées et à quoi ressemblaient les premières étoiles. En outre, le James Webb a également été envoyé dans le but de comprendre comment les trous noirs supermassifs sont apparus et comment ils ont fini par se retrouver au centre des galaxies.

Depuis sa mise en service en 2022, le télescope James Webb a fourni de nombreux indices permettant de répondre à ces questions. La découverte qui a le plus attiré l’attention a été l’observation selon laquelle les galaxies dans le jeune Univers étaient déjà bien plus grandes que ce que l’on imaginait. Les trous noirs supermassifs étaient eux aussi plus massifs et se trouvaient déjà au centre des galaxies. Ainsi, plusieurs hypothèses ont été écartées au fil des années, tandis que d’autres ont gagné en importance au sein de la communauté scientifique.

Cette semaine, des observations du télescope James Webb pourraient avoir capturé un phénomène susceptible d’expliquer l’origine des trous noirs supermassifs. Les données concernent un objet surnommé la galaxie de l’Infini. Cette galaxie pourrait contenir des indices du tout premier cas observé d’un effondrement direct en un trou noir supermassif. Si cette découverte est confirmée, elle pourrait bien constituer la pièce manquante pour comprendre comment des trous noirs supermassifs gigantesques ont pu se former aussi rapidement au début de l’Univers.

Trous noirs supermassifs

Les trous noirs supermassifs sont des trous noirs dont la masse atteint des millions à des milliards de fois celle du Soleil. Chaque galaxie possède un trou noir supermassif situé en son centre. La Voie lactée, par exemple, abrite un trou noir de 4 millions de masses solaires, appelé Sgr A*. Il est possible de détecter la présence d’un trou noir supermassif en observant les effets qu’il produit sur les étoiles environnantes.

Sgr A* a été découvert en 2002, lorsque l’astrophysicienne Andrea Ghez a observé le mouvement des étoiles au centre de la Voie lactée. Il a ensuite été photographié par le télescope EHT en 2017, et l’image a été rendue publique en 2022.

Un autre trou noir supermassif étudié en détail est M87*, un trou noir de 7 milliards de masses solaires situé au centre de la galaxie M87. Malgré des décennies d’observations, on ne sait toujours pas comment ces objets se forment ni comment ils ont atteint le centre des galaxies. Actuellement, l’hypothèse la plus largement acceptée est celle de l’effondrement direct, car elle permet d’expliquer comment ces objets existaient déjà dans le jeune Univers.

Effondrement direct

L’une des premières hypothèses sur l’origine des trous noirs supermassifs suggérait qu’ils se formaient à partir de trous noirs plus petits, qui grandissaient progressivement en absorbant de la matière et en fusionnant entre eux au fil du temps. Toutefois, les observations de trous noirs supermassifs dans le jeune Univers montrent qu’ils étaient déjà très massifs à cette époque, ce qui implique qu’il n’y aurait pas eu suffisamment de temps pour qu’ils atteignent une telle taille par ce processus lent. C’est pourquoi l’hypothèse de l’effondrement direct a gagné en popularité parmi les astronomes.

L’effondrement direct se produit lorsque, dans certaines conditions, d’immenses nuages de gaz s’effondrent rapidement sous l’effet de la gravité pour former directement un trou noir de grande taille. Ce mécanisme serait bien plus efficace que la croissance progressive d’un trou noir issu de l’effondrement d’une étoile. Il permettrait ainsi d’expliquer la présence de trous noirs supermassifs très tôt dans l’histoire de l’Univers.

Galaxie de l’Infini

Cette semaine, la NASA a dévoilé les observations réalisées par le télescope James Webb d’un objet surnommé la galaxie de l’Infini. L’objet a reçu ce nom car il est formé de deux galaxies en cours de collision, dessinant une forme semblable au symbole de l’infini. Ces deux galaxies en train de fusionner sont des galaxies spirales, et chacune abrite en son centre un trou noir supermassif.

Ce qui a particulièrement attiré l’attention des chercheurs, c’est la détection d’un troisième trou noir supermassif qui ne se trouve au centre d’aucune des deux galaxies. Il est situé dans une région gazeuse, précisément à la frontière de l’intersection entre les deux galaxies en collision. D’après les études, ce trou noir se serait formé directement à cet endroit, par un processus d’effondrement direct d’un nuage de gaz. S’il est confirmé, il s’agirait de la première observation directe de ce mécanisme, longtemps soupçonné, qui pourrait expliquer la formation rapide des trous noirs supermassifs dans l’Univers jeune.

Une première observation du phénomène

Afin d’écarter d’autres scénarios, les astronomes impliqués dans l’étude de la galaxie de l’Infini ont analysé en détail les données et testé diverses hypothèses. L’une d’elles suggérait que ce trou noir pourrait provenir d’une troisième galaxie ou qu’il aurait été éjecté d’un autre endroit. Ces hypothèses ont été abandonnées lorsque les données ont révélé que le trou noir supermassif possède une vitesse très similaire à celle du gaz environnant, ce qui indique clairement qu’il est né à cet emplacement.

Les observations suggèrent que deux galaxies spirales sont entrées en collision, provoquant la compression et le réchauffement du gaz présent. Cette accumulation a créé une région extrêmement dense qui se serait effondrée directement en un trou noir. Parmi les preuves soutenant cette hypothèse, on note la présence d’une région de gaz ionisé autour du trou noir, ainsi que le fait que ce dernier est actif, c’est-à-dire en train de se nourrir de la matière qui l’entoure.

Référence de l'article :

NASA’s Webb Finds Possible ‘Direct Collapse’ Black Hole