Nouveaux forages pétroliers en Île-de-France : y a-t-il vraiment un risque pour l'alimentation en eau potable ?

La mairie de Paris s'insurge de la prochaine construction de deux nouveaux puits de pétrole en Seine-et-Marne, en évoquant un risque pour l'alimentation en eau potable. Pourquoi ce projet ? Ces craintes sont-elles justifiées ?

Forage pétrolier puits prétexte
L'État a autorisé la construction de deux nouveaux puits de pétrole à quelques centaines de mètres d'un point de captage clé pour l'alimentation en eau potable de 180.000 habitants d'Île-de-France.

Au tout début de l'année 2024, l'État a donné un feu vert peu médiatisé pour autoriser le forage de deux nouveaux puits de pétrole sur un site exploité par la société Bridge Energies dans la vallée du Lunain, en Seine-et-Marne, à quelques kilomètres au Sud de Paris. Le problème, c'est que ce site se situe non loin d'un point de captage clé pour l'alimentation en eau potable de la région.

Une "catastrophe environnementale en puissance" ?

C'est le journal Libération qui, après une enquête poussée, a révélé le projet, qui décidément va à l'encontre de l'objectif de la France de sortir des énergies fossiles, notamment du pétrole, d'ici 2040. Un projet qui inquiète la mairie de Paris, qui évoque dans un communiqué une "catastrophe environnementale en puissance" menaçant la ressource en eau, près d'une rivière classée Natura 2000.

L'opérateur Eau de Paris a même saisi en référé le tribunal administratif de Melun pour faire suspendre l'arrêté préfectoral du 30 janvier qui autorise l'ouverture des travaux, à 1500m de profondeur et à quelques centaines de mètres du point de captage qui alimente en eau potable 180.000 franciliens, des habitants de Paris essentiellement mais aussi de Seine-et-Marne.

La saisine évoque une compromission de "la sécurité de l'alimentation en eau potable de la ville de Paris", mais aussi des menaces sur la biodiversité ou encore un contresens dans la lutte contre le changement climatique

L'autorisation du projet est pourtant intervenue après une enquête publique. Il s'agira des 4e et 5e puits de pétrole de l'entreprise Bridge Energies, qui en exploite déjà trois.

Un risque de pollution de l'eau et des sols ?

Le président d'Eau de Paris, Dan Lert, également adjoint à la mairie de Paris en charge de la transition écologique, appelle carrément les Français à se mobiliser contre l'extension du projet pétrolier, évoquant un "risque de pollution de l'eau et des sols par les hydrocarbures". Deux incidents se sont d'ailleurs déjà produits sur le site par le passé, selon lui.

La zone, autour de la ville de Nonville, a été classée il y a trois ans comme "périmètre de protection éloignée" en raison des risques de pollution de l'eau : comme il s'agit d'extraire et de manipuler des barils de pétrole, Dan Lert estime que le gouvernement "joue avec le feu". Un incident pourrait à nouveau se produire pendant l'exploitation ou les forages.

Des inquiétudes relayées par Greenpeace France, qui évoque un "en même temps" contraire aux objectifs de sortie des énergies fossiles. Par ailleurs, la Mission régionale de l'autorité environnementale d'Île-de-France avait émis en avis en 2023 demandant "d'analyser et de prévenir les risques d'un accident ou d'un acte de malveillance" pouvant entraîner des pollutions au pétrole dans le Lunain.

Pour le moment, la société concessionnaire Bridge Energies ne souhaite faire aucun commentaire avant la première ordonnance du tribunal administratif. La décision devrait être connue dans les prochains jours. En attendant, l'État se défend via le ministre délégué à l'Industrie, Roland Lescure, selon qui le gouvernement respecte "la loi, les décisions de justice et aussi l'environnement".

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