La France dans le top 3 des pays où l'on bétonne le plus selon une vaste enquête menée à l'échelle européenne

Chaque année, 1500 km² d'espaces naturels et agricoles sont bétonnés en Europe, l'équivalent de 24 terrains de football par heure. C'est une enquête basée sur des photos satellites, menée par Le Monde et plusieurs médias européens, qui a révélée l'ampleur de cette artificialisation à grande échelle.

Chaque année en Europe, l'équivalent de la surface de la ville de Londres est bétonnée au détriment de la nature.
Chaque année en Europe, l'équivalent de la surface de la ville de Londres est bétonnée au détriment de la nature.

Environ 9000 km², c'est la surface perdue entre 2018 et 2013, soit l'équivalent de Chypre, au profit de la construction et donc de l'artificialisation des sols. C'est ce qu'a révélé l'enquête "Green to Grey", Comment l'Europe vire du vert au gris, menée par 41 journalistes et scientifiques de onze pays et coordonnée par le réseau Arena for journalism in Europe.

On y apprend l'érosion de 1500 km² de nature par an à l'échelle du continent, un chiffre 1,5 fois supérieur aux dernières estimations fournies par les institutions européennes. Ces résultats montrent que les données de l'Agence européenne pour l'environnement (EEA) « sous-estiment probablement » l'ampleur de l'artificialisation en Europe.

La France, 3e pays le plus bétonné d'Europe

Comme l'explique l'enquête, la France est, en valeur absolue, le troisième contributeur à l'artificialisation des sols, derrière la Turquie et la Pologne. Cela représente pour l'Hexagone, 950 km² d’espaces naturels bétonnés, soit neuf fois la superficie de Paris, entre 2018 et 2023.

Ces résultats ont pu être obtenus grâce à une analyse d'images satellitaires, à la résolution plus fine que celle de l'EEA, couplée à un modèle d'apprentissage automatique. Il s'agit de l'analyse la plus fine de la consommation d'espaces naturels jamais réalisés à l'échelle européenne.

Les secteurs les plus consommateurs

En fonction des pays, le type de nature grignotée varie. L'Europe centrale a surtout vu reculer ses terres arables tandis qu'en Scandinavie et dans les pays du sud, ce sont plutôt les forêts et les écosystèmes côtiers qui disparaissent le plus. Et ces pertes sont dues à différents secteurs d'activité.

En premier lieu, le secteur immobilier a été responsable à lui-seul de 41% de l'artificialisation entre 2018 et 2023. « Nous avons du mal à détecter les petites dégradations des sols, mais ces petites surfaces finissent par représenter une consommation foncière considérable », estime Peter Lacoere, chercheur en urbanisme à la haute école de Gand en Belgique.

En France, les opérations de moins de huit logements par hectare sont responsables de 51% de la consommation d'espace. A l'échelle européenne, viennent ensuite la logistique et les transports (22% d'artificialisation), les activités agricoles (13%), l'industrie manufacturière (9%), les commerces, services, sports et loisirs (8,5%) et enfin l'énergie (2%).

Des effets dévastateurs sur les écosystèmes

Véritable désastre pour la biodiversité, l'imperméabilisation des sols et d'espaces naturels perturbent le cycle de l'eau et « réduit la capacité de l'écosystème à faire tampon », explique Guy Pe'er, biologiste au Centre Helmholtz pour la recherche environnementale. Résultat ? Un risque accru d'inondations, entre autres.

Ces pratiques accélèrent la disparition de la nature pourtant indispensable à notre survie. Comme le dénonce Lena Schilling, eurodéputée et militante écologiste autrichienne, dans les colonnes de Libération, « Pendant des années, l’Europe a promis d’être un leader en matière de préservation du climat et de la nature, mais ce que montre cette enquête, c’est que nous sommes littéralement en train de bétonner notre propre avenir. »

Références de l'article :

Enquête Green to Grey, Green to Grey

Le Monde, Comment l'Europe vire du vert au gris