Quels sont les secrets des "sinkites", ces mystérieux géants du fond de la mer du Nord ?
La mer du Nord est encore pleine de mystères. Une nouvelle découverte vient de nous apprendre l'existence dans les fonds marins de cette mer européenne d'immenses monticules de sable, les "sinkites". D'où viennent-ils ?

L'étude des sous-sols et des fonds marins n'en finit pas de nous étonner ! Des recherches, menées par un scientifique anglais de l'université de Manchester et un ingénieur d'une société pétrolière norvégienne, révèlent l'existence d'un phénomène mystérieux sous la mer du Nord : les "sinkites", sortes d'immenses monticules de sable. D'où viennent-ils ? Quels sont leurs secrets ?
Des structures de plusieurs kilomètres de large !
En 2023, une équipe de chercheurs allemands avait déjà percé quelques mystères au fond de la mer du Nord : des milliers de petits trous présents sur le plancher marin avaient été attribués à un comportement animal, alors qu'au départ, des fuites de méthane avaient été suspectées.
Km-scale mounds and sinkites formed by buoyancy driven stratigraphic inversion https://t.co/ceHHpqpqUe pic.twitter.com/xqZS6qrK28
— Communications Earth & Environment (@CommsEarth) June 22, 2025
Cette fois, notre duo anglo-norvégien était en quête de réserves d'hydrocarbures mais aussi, l'assurent-ils, de cavités pour injecter du CO2 capté dans l'atmosphère autour des usines, dans le but de lutter contre le réchauffement climatique. Et ce qu'ils ont découvert, cachés sous la mer du Nord, ce sont des centaines de monticules de sable géants.
Mesurant jusqu'à plusieurs kilomètres de large, ces monticules, baptisés "sinkites" par les deux hommes, ont été repérés grâce à des techniques d'imagerie sismique 3D à haute résolution, combinées à l'analyse d'échantillons issus de puits de forage expérimentaux. Le mot "sinkite" vient de l'anglais "sink", qui signifie "couler", et du suffixe "-ite" désignant les roches.
Selon le professeur Huuse, l'un des deux auteurs de l'étude, ces monticules géants seraient issus d'un processus géologique "inédit à cette échelle", lorsque des structures de sable dense s'enfoncent dans des sédiments plus légers, créant ces immenses collines sous-marines. On parle d'"inversion stratigraphique".
Une formation sismique
La stratigraphie étudie les dépôts sédimentaires, sous la forme de strates ou de couches, pour établir une chronologie : logiquement, une couche est supposée avoir le même âge sur toute son étendue, et la couche de roches la plus basse est normalement la plus ancienne.
#Hundreds of giant 'sinkites'sand bodies that invert typical geological layeringhave been identified beneath the North Sea, challenging subsurface models and impacting carbon storage strategies. @AdmissionsUoM @NaturePortfolio https://t.co/Z1HkQwMIDN https://t.co/AITkUPUDc3
— Phys.org (@physorg_com) July 9, 2025
Mais en cas d'"inversion stratigraphique", souvent d'origine tectonique, une couche plus ancienne de sédiments peut alors surplomber une couche plus jeune. Déjà observé à petite échelle, ce phénomène à grande échelle à travers les "sinkites" serait l'exemple le plus massif d'"inversion stratigraphique" documenté à ce jour.
Ces "sinkites" se seraient formées il y a plusieurs millions d'années, entre le Miocène supérieur et le Pilocène, lorsque des séismes ou des variations soudaines de la pression dans le sous-sol auraient provoqué la "liquéfaction" du sable et son enfoncement dans des fractures naturelles.
Une couche de sédiments plus ancienne, composés de minuscules fossiles marins, aurait alors été propulsée vers le haut. Comprendre la formation et les secrets de ces "sinkites" pourrait nous permettre de mieux évaluer et identifier les réservoirs souterrains et leur étanchéité, en vue du stockage du carbone en toute sécurité sous terre et sous le mer.
Références de l'article :
J.E. Rudjord and M. Huuse, Communications Earth & Environment, 2025. Km-scale mounds and sinkites formed by buoyancy driven stratigraphic inversion.