Municipalité 2026 : le risque climatique est-il en train de redessiner les priorités locales ?
Selon une étude nationale de référence menée par Ipsos BVA pour la Fondation Jean-Jaurès et la Macif, canicules, inondations et sécheresses bouleversent déjà les territoires. À l’approche des municipales de 2026, les risques climatiques pèsent-ils désormais sur les choix politiques locaux ?

Le premier enseignement de l’enquête est sans ambiguïté : 73 % des Français déclarent avoir subi au moins plusieurs fois les conséquences d’un risque climatique au cours des cinq dernières années. Les épisodes les plus fréquemment cités sont les chaleurs extrêmes et canicules (60 %), suivies des sécheresses (44 %) et des tempêtes ou fortes averses de grêle (34 %). Ce vécu est encore plus marqué dans certaines régions, notamment le Sud-Est, et touche davantage les catégories sociales les plus modestes.
Malgré cette exposition massive, le risque climatique ne s’impose pas spontanément comme la priorité numéro un. Seuls 42 % des Français le placent en tête des risques, derrière les risques économiques (47 %) et à égalité avec les risques géopolitiques et sécuritaires. Le risque est là, tangible, mais souvent perçu comme diffus, intermittent, concurrencé par les urgences du quotidien.
Des élus locaux beaucoup plus lucides face au danger ?
Le contraste avec les décideurs locaux est frappant. Près de trois quarts des élus municipaux (74 %) placent le risque climatique au premier rang, très loin devant les risques économiques (25 %) ou sociaux (17 %). Dans les entretiens qualitatifs, les mots reviennent avec insistance : le risque climatique est qualifié d’« incontournable », de « préoccupation majeure », souvent évoqué en premier, avant même toute question économique.

Cette lucidité s’explique par la position des maires, en première ligne face aux conséquences concrètes des événements. Comme le confie l’un d’eux :
Pour les élus, le risque climatique n’est pas une projection abstraite, mais une contrainte permanente qui engage leur responsabilité politique, financière et juridique.
Quand l'expérience forge la mémoire et les choix politiques
L’étude montre que l’expérience directe d’un événement climatique marque durablement les territoires. 82 % des élus déclarent que leur commune a déjà subi au moins un risque climatique, et ce chiffre grimpe à 93 % dans les communes de plus de 10 000 habitants. Les canicules (68 %), les sécheresses (54 %) et les inondations (28 %) structurent désormais les décisions locales, de l’aménagement à la gestion de crise. Dans les communes touchées, cette mémoire devient un levier politique.
explique un élu d’une commune de 1 200 habitants, confronté à la prévention sans moyens suffisants. Là où le risque a laissé une empreinte, il redessine les priorités, renforce la vigilance et modifie durablement l’agenda municipal.
Santé, confort de vie, finances : des impacts très concrets
Pour les citoyens exposés, les conséquences sont déjà lourdes. 44 % constatent une baisse de leur confort de vie, et 27 % évoquent un impact négatif sur leur santé, à la fois physique (17 %) et mentale (15 %). Les pertes financières, l’isolement et la fatigue psychologique s’ajoutent aux dommages matériels, installant un sentiment de vulnérabilité durable.
Face à ces situations, les réactions restent contrastées. 39 % des Français ayant subi plusieurs risques déclarent un sentiment de fatalisme, tandis que 26 % expriment de la colère. L’anticipation progresse, mais lentement : 45 % reconnaissent penser aux risques sans passer à l’action, révélant un décalage persistant entre conscience et mobilisation.
Municipales 2026 : un enjeu électoral désormais assumé
À quelques mois du scrutin, le risque climatique s’installe clairement dans le débat local. 52 % des maires déclarent vouloir traiter la question climatique dans leur futur programme, une proportion qui atteint 57 % dans le Sud-Est et 60 % dans les communes de plus de 20 000 habitants. Pour les élus, il s’agit du premier sujet de prévention cité, loin devant les risques économiques.
Mais cette priorité reste conditionnée au contexte local. Les élus le reconnaissent : le risque devient un enjeu électoral fort là où des événements marquants ont laissé une trace durable. Ailleurs, il demeure concurrencé par la sécurité, le pouvoir d’achat ou les services publics. À l’approche de 2026, une chose est certaine : le risque climatique ne disparaît plus des radars municipaux. Il redessine déjà, lentement mais sûrement, les contours de la politique locale.
Références de l'article
Ipsos. (2025, 31 octobre). Municipales 2026 : les risques climatiques au cœur du débat.
Feitz, A. (2025, 31 octobre). Municipales 2026 : les risques climatiques, première préoccupation des élus locaux. Les Échos.
Agnoux, É., Bristielle, A., Calatayud, B., Dogneton, J.-P., Grosse-Delasalle, J.-L., Gulphe-Lachaud, I., Klotz, P., Lapointe, M., Stern, L., & Zulfikarpasic, A. (2025, 30 octobre). Vivre le risque. Les Français et les décideurs locaux face au dérèglement climatique. Fondation Jean‑Jaurès.