Collision avec les bateaux : les baleines responsables ?
Une récente étude révèle pourquoi il y a autant de collision entre les bateaux et les baleines à bosses. Et ce ne serait pas la faute des humains...

La baleine à bosse est le plus gros animal vivant sur notre planète et plus précisément dans nos océans. Ce cétacé est un grand voyageur qui migre dans l'océan Pacifique chaque année pour mettre bas. Mais lors de leurs périples, ces cétacés peuvent heurter de nombreux bateaux : frégates, voiliers, bateaux de pêche... Ces collisions leurs sont parfois fatales.
Un récente étude de la revue scientifique britannique Proceedings of the Royal Society B. révèle que ces collisions seraient de la faute des baleines. Ou plutôt à cause de leur très mauvaise vue.
Des baleines myopes !
L'expression dit "myope comme une taupe" mais nous pourrions dire "myope comme une baleine". En effet, le plus gros animal vivant au monde a une acuité visuelle extrêmement médiocre. D'abord, les baleines à bosses ne voient qu'en noir et blanc. Cette vision bi-colore leur permet de percevoir l'environnement qui les entoure mais sans réel contour. Elles distinguent uniquement des silhouettes noires très floues.
Lœil dune baleine à bosse vu de près. Un cliché incroyable capturé par la photographe sous-marine Rachel Moore pic.twitter.com/rWFzeQyaCG
Creapills (@creapills) October 13, 2024
Plus l'élément autour d'elles est petit, moins elles le perçoivent. Pour voir de façon nette et précise, leurs yeux (pouvant atteindre la taille d'un ballon de foot) doivent être très proches de l'élément à observer. Elles voient bien de près mais flou de loin... comme les myopes ! Et elles n'ont pas la chance de disposer de l'écholocalisation, comme de nombreux autres cétacés, qui leur permet de se repérer dans l'espace grâce aux sons.
Résultat : avec une telle vision, les baleines ne voient pas les filets de pêche et foncent droit dedans. Elles ne peuvent les voir qu'au dernier moment quand il est trop tard pour les éviter. Emmêlées dans les filets, elles peuvent rester coincées jusqu'à des jours et parfois mourir...
Dissection d'un oeil de jeune baleine à bosse
Pour obtenir ces résultats, Jacob Bolin, chercheur en biologie à l’Université de Caroline du Nord et coauteur de l’étude et son équipe ont disséqué l'oeil d'une baleine à bosse. Évidemment, elle n'a pas été pêché dans un but scientifique, il s'agissait d'un cadavre retrouvé échoué en 2011 sur une plage de Caroline du Nord aux États-Unis. Les organes de l'animal avaient été conservés pour que la science puisse les étudier.
Cette baleine a des cicatrices de 30 cm de profondeur dues à des coupures par les hélices d'un bateau. Elle a survécu et se fait appeler « Blade runner » pic.twitter.com/tShrA8v8Lh
Bati (@bati_acl) October 9, 2021
La mauvaise vue des baleines est due à une faible densité de cellules ganglionnaires (une sorte de neurones présents dans la rétine et qui sert à voir). Jacob Bolin a relevé environ 180 ganglions rétiniens par mm2 au maximum lors des prélèvements. À titre de comparaison, l'espèce humaine possède entre 35 000 et 40 000 ganglions rétiniens/mm2. Pour les oiseaux, ce chiffre peut aller jusqu'à 70 000 !
Aussi, l'oeil de la baleine à bosse est composé d'un tiers de sclérotique (le blanc de l'oeil qui entoure le globe oculaire et qui n'a rien à voir avec la vision). Le fait qu'elles aient de gros yeux ne signifie pas qu'elles voient mieux, au contraire !
Limiter les collisions mortelles entre les bateaux et les baleines
Les résultats de cette étude permettent de mieux comprendre la faiblesse visuelle de ces animaux marins, et pourquoi il y a autant de chocs entre les navires et ces cétacés dont la taille peut atteindre les 16 mètres de longueur !
"Ce travail permet de combler une lacune importante dans notre compréhension de l’écologie sensorielle des grandes baleines, de la manière dont les baleines à bosse perçoivent leur monde", insiste la professeure adjointe de biologie et biologie marine, Lori Schweikert.
Grâce à cette découverte, les biologistes espèrent donner envie aux ingénieurs pour trouver de nouvelles "stratégies afin de rendre les engins de pêche plus visibles", ce qui permettrait aux baleines d'éviter le contact, développe la biologiste également coauteure de l'étude.
Sources : NYTimes/Libération