Insolite : La graisse animale comme nouveau carburant écologique ? Rien n'est moins sûr.

La graisse animale est aujourd'hui considérée comme un carburant écologique et est utilisée par de plus en plus d'industries. Toutefois, les stocks restent limités et son utilisation pourrait avoir l'effet inverse que celui initialement escompté dans le futur.

Graisse animale
La graisse animale est aujourd'hui un biocarburant de plus en plus utilisé dans de nombreuses industries

La graisse des porcs, des bovins ou encore des poulets morts est aujourd'hui utilisée pour fabriquer des carburants plus écologiques et donc moins nocifs pour la planète. Toutefois, de nouvelles études préviennent que ce type de carburant pourrait, à terme, avoir l'effet inverse.

La graisse animale : un carburant efficace et écologique ?

Beaucoup de personnes ignorent que la graisse d'animaux morts peut être utilisée comme combustible et donc comme carburant écologique. Pourtant, le suif et le saindoux servent déjà à la fabrication des bougies, des savons ou encore des cosmétiques depuis plusieurs siècles. Ce n'est toutefois que depuis une vingtaine d'années environ que le biodiesel fabriqué à partir de graisses animales s'est véritablement démocratisé, les gouvernements du monde entier étant en recherche de combustibles plus écologiques. En effet, les graisses animales sont des déchets, de sorte que le carburant fabriqué à partir de ce matériau est considéré comme écologique et donc meilleur pour la planète.

En Europe, l'utilisation de ce type de biocarburant a été multipliée par 40 depuis 2006 selon les dernières données disponibles à ce sujet, preuve que celui-ci prend de plus en plus d'importance dans nos industries et notre vie de tous les jours. Une grande partie de ce carburant est utilisé dans les moyens de transport comme les voitures et les camions sous forme de biodiesel. Considéré comme carburant durable, il possède une empreinte carbone beaucoup plus faibles que d'autres combustibles et est donc meilleur pour la planète.

Les gouvernements et les industries de nombreux pays du monde sont aujourd'hui désireux de trouver des solutions pour réduire leurs émissions et donc limiter la pollution de l'environnement. Ces nouveaux biocarburants sont donc de plus en plus utilisés et même imposés pour les industries les plus polluantes comme l'aviation. De ce fait, certains gouvernements obligent aujourd'hui les compagnies aériennes une proportion plus importante de ce type de carburant dans les réservoirs des avions. Par exemple, le gouvernement du Royaume-Uni imposera aux compagnies aériennes une utilisation de ce type de biocarburant à hauteur de 10% d'ici 2030 et l'Union Européenne à hauteur de 6%.

Cette utilisation et cette demande croissante devrait toutefois faire émerger une nouvelle problématique pour les industries du monde entier. Les graisses animales émettent en effet bien moins de gaz à effet de serre que les autres carburants et sont donc une solution écologique très intéressante pour les compagnies de transport, mais la production de celles-ci pourra-t-elle suivre la demande toujours plus importante ?

Y aura-t-il assez de graisse animale pour répondre à la demande ?

D'après une étude publiée récemment par un groupe de chercheurs de Bruxelles, imposer un pourcentage de plus en plus important de biocarburant issus de graisses animales à l'industrie de l'aviation pourrait avoir l'effet inverse de celui escompté au niveau environnemental. En effet, selon cette étude, il n'y a tout simplement pas assez d'animaux abattus chaque année pour répondre à la demande croissante des compagnies aériennes en graisses animales.

Selon cette étude, un vol Paris - New-York aurait besoin de 8 800 porcs morts si tout le carburant provenait de graisses animales. Sachant que l'Union Européenne devrait imposer un pourcentage de carburant durable d'environ 6% dans les réservoirs des avions, cela nécessiterait environ 400 porcs par vol transatlantique, ce qui est énorme sachant le nombre de vols effectués chaque jours à travers le monde.

Ainsi, l'aviation pourrait à terme consommer une grande majorité des graisses animales produites afin de limiter ses émissions de gaz à effet de serre, ce qui pourrait obliger d'autres industries à utiliser des ingrédients alternatifs. Par exemple, les graisses animales sont importantes dans la fabrication d'aliments pour animaux de compagnie et pourront être difficilement remplacées si celles-ci sont monopolisées par l'aviation.

Finalement, les industries où la graisse est actuellement la plus utilisée devront chercher des alternatives dans le futur. Et cette alternative est aujourd’hui l'huile de palme dont l'utilisation est intimement liée à l'augmentation des émissions de gaz à effet de serre à mesure que les forêts stockant de grandes quantités de carbones sont défrichées pour de nouvelles plantations.

L'utilisation de plus en plus importante de graisses animales comme biocarburant pourrait donc avoir l'effet inverse de celui escompté à terme, notamment si celles-ci sont majoritairement utilisées dans l'aviation. Si les émissions pourraient être réduites grâce à elles dans ce domaine, elles pourraient au contraire être largement augmentées dans d'autres. Une solution qui ne serait donc pas si bénéfique qu'initialement envisagé pour la planète.

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