Pourquoi les centrales nucléaires françaises doivent ralentir lors des canicules ?

Les fortes chaleurs de cette fin juin 2025 pourraient contraindre certaines centrales nucléaires françaises à réduire leur production d'énergie d'après un récent communiqué d'EDF, notamment en raison de températures de l'eau trop élevées autour des centrales en question.
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Pourquoi certaines centrales vont devoir ralentir leur production d'électricité en raison des fortes chaleurs ?

Avec les fortes chaleurs persistant sur la France depuis plusieurs semaines, EDF a récemment prévenu que quatre sites nucléaires situés sur le Rhône et la Garonne pourraient être contraints de baisser leur production d'électricité. Comment expliquer cela ?

Une question de température … de l'eau !

La chaleur se montre parfois caniculaire en cette seconde quinzaine de juin 2025, notamment depuis la semaine dernière avec des températures particulièrement élevées de jours comme de nuit sur de nombreuses régions. En plus des communiqués de Météo-France sur les risques qu'induisent ces fortes chaleurs durables, EDF a prévenu dans un communiqué ce 24 juin que la production d'électricité du parc nucléaire pourrait être affecté par ces températures.

Ce sont notamment quatre sites qui pourraient être affectés, celui de Blayais en Gironde, de Golfech dans le Tarn-et-Garonne, de Saint-Alban-du-Rhône en Isère et de Bugey dans l'Ain. D'après le communiqué en question, les températures élevées des cours d'eau bordant ces centrales nucléaires seraient à l'origine de cette possible baisse de production d'électricité.

En effet, les centrales nucléaires pompent l'eau des cours d'eau ou de la mer pour se refroidir, avant de la rejeter à des températures plus élevées dans ces mêmes sources d'eau. Or, cette pratique est encadrée par des seuils de débit mais également des seuils d’échauffement, notamment depuis les canicules de 2003 et 2006, des mesures prises pour protéger la faune et la flore.

La hausse de la température implique effectivement une diminution de la quantité d'oxygène dissous dans l'eau, ce qui affecte de façon non négligeable la faune et la flore. Ainsi, lorsque le seuil de 25°C est atteint en amont d'une centrale, l'installation électrique ne peut la réchauffer que de 3°C pour éviter tout effet sur la biodiversité. Ce seuil de 28°C en aval est aujourd'hui la référence de limite considérée comme n'ayant pas d'incidences notables pour le milieu aquatique.

De ce fait, lorsque ces seuils sont susceptibles d'être dépassés durant des vagues de chaleur durables, des canicules ou des sécheresses, la puissance du réacteur peut être abaissée afin de limiter l'échauffement en aval. Lors des épisodes les plus intenses, cela peut aller jusqu'à l'arrêt complet du réacteur.

Une solution qui n'en est pas vraiment une dans le contexte de réchauffement climatique

Avec le réchauffement climatique, les épisodes de chaleur sont de plus en plus fréquents en France. Entre 2011 et 2025, ce sont par exemple 25 épisodes de ce type qui ont été observés, soit autant qu'entre 1947 et 2010, preuve d'une accélération de la fréquence des vagues de chaleur et canicules. De plus, si les températures moyennes de l'air augmentent d'années en années, c'est également le cas pour celles des cours d'eau.

Selon une étude réalisée par EDF, les eaux du Rhône se sont réchauffées de +0,6°C à Bugey, +0,9°C à Saint-Alban et +2,1°C à Tricastin entre 1920 et 2010, et le constat et similaire sur bon nombre de cours d'eau français. Une situation qui ne devrait d'ailleurs par aller en s'améliorant, les modèles de prévisions envisageant par exemple un réchauffement des eaux alpines de 1,6°C d'ici le milieu du siècle, réchauffement qui pourrait atteindre +3,2°C dans tous les cours d'eau d'ici 2100 selon le Centre suisse des services climatiques.

Ainsi, la solution de diminuer la production d'électricité de certains sites ou alors les arrêter complètement pourrait ne plus devenir viable dans un avenir plus ou moins proche, d'autant plus que la hausse des températures induit également une augmentation de la demande d'électricité.

Néanmoins, EDF intègre les enjeux liés au changement climatique dans la construction de ses nouveaux réacteurs nucléaires, en dimensionnant les systèmes de refroidissement et de sûreté, pour assurer la disponibilité maximale des réacteurs dans les conditions climatiques qui peuvent être anticipées.

Le parc existant est également régulièrement amélioré dans cette optique, même si certaines centrales comme celles menacées actuellement de baisse de production sont particulièrement sensibles aux évolution de débit et aux limites thermiques. Ainsi, les centrales de Bugey et de Golfech pourraient voire leur production baisser de 2 à 3% par an sur la période 2020-2050.

Référence de l'article :

Vague de chaleur : on vous explique pourquoi les centrales nucléaires sont forcées de ralentir pour ne pas trop réchauffer les cours d'eau, FranceInfo (25/06/2025), Camille Adaoust