Des milliers de Péruviennes stérilisées de force : les Nations Unies parlent d’un potentiel crime contre l’humanité

Durant les années 90, au Pérou, le gouvernement d'Alberto Fujimori fait subir à des milliers de femmes, des stérilisations de force. À l’époque, l’État explique vouloir éradiquer la pauvreté. Aujourd’hui, les victimes réclament justice et les Nations Unies annoncent un potentiel crime contre l’humanité.

Une grande majorité de femme Indigènes
Une grande majorité de femme Indigènes


Un possible « crime contre l’humanité. » C’est ce qu’annonce, en octobre 2024, le comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (Cedaw). Entre 1996 et 2001, plus de 300 000 péruviennes, en majorité des femmes indigènes Quechua, sont stérilisées contre leur gré. Aujourd’hui, elles demandent réparation pour les préjudices physiques et psychologiques qu’elles ont subi.

Il s’agit de la plus grande affaire de stérilisation forcée en Amérique Latine

À cette époque, le pays est le théâtre d’un violent conflit entre le gouvernement d'Alberto Fujimori, au pouvoir entre 1990 et 2000, et les guérillas d’extrême gauche. Alors que ce conflit gangrène le Pérou, des femmes autochtones sont stérilisées à leur insu, partout dans le pays. Le gouvernement de l’époque annonçait vouloir vaincre la pauvreté, mais ces stérilisations ont été effectuées en grande majorité sur des femmes venant de milieux défavorisés.

L’ONU dénonce des « faits généralisés et systématiques » et des « des violences sexuelles et une discrimination intersectionnelle »

Ces stérilisations se font de force, à l’insu de ces femmes, souvent peu éduquées. C’est dans des structures publiques qu’elles subissent ces violences. María Elena Carbajal, l’une des victimes, accouche de son quatrième enfant dans un hôpital de la capitale Lima, en 1996, à l’âge de 26 ans. Elle raconte que les infirmières lui ont interdit de voir son bébé, à moins de se faire ligaturer les trompes. Effrayée de ne pas pouvoir voir son enfant, elle accepte.

Florentina Loayza, elle, se souvient avoir été « entassée comme du bétail » dans un véhicule, alors qu’elle se rendait dans un centre de santé pour récupérer des « provisions » promises par le gouvernement. Un leurre. En réalité, des infirmières lui injectent un sérum. Elle n’a aucun souvenir avant son réveil, quand on lui annonce qu’elle ne pourra plus avoir de bébé.

Aujourd’hui, l’ONU demande à l’État péruvien de dédommager ses victimes

Pire encore, durant l’été 2024, le gouvernement péruvien a fait passer une loi interdisant la poursuite des crimes contre l'humanité ayant eu lieu avant le 1er juin 2002. Une façon de protéger l’ancien président Alberto Fujimori, mort l’année dernière. Il a passé seize ans emprisonné pour violations des droits humains.

Des femmes à Lima ont également subi ces violences
Des femmes à Lima ont également subi ces violences

La Cour interaméricaine des droits de l'homme a exigé l’annulation de cette loi. En effet, si le président coupable de ces atrocités est décédé, certains de ses ministres exerçant à l’époque, sont toujours vivants. Et s’il s’agit de la plus grande affaire de stérilisation forcée documentée en Amérique Latine, les Péruviennes ne sont pas les seules femmes autochtones a avoir subi ces violences.

Dans les années 60, les femmes Inuits du Groenland sont victimes de stérilisations également. Dans les années 70, les femmes Amérindiennes des États-Unis endurent le même sort. Les femmes Aborigènes d’Australie s’ajoutent à la liste des victimes. Aujourd’hui, l’inquiétude résulte de la position de Donald Trump, de retour à la Maison Blanche et de son point de vue sur le droit à l’avortement.

Références de l’article :

Pérou : la stérilisation forcée de 325 000 autochtones dans les années 90, "potentiel crime contre l'humanité"

La dette du Pérou envers les milliers de femmes stérilisées de force

Au Pérou, des milliers de femmes stérilisées de force réclament justice