La NASA confirme : le lac sous la glace sur Mars n’a jamais existé et voici ce qui s’y trouvait réellement
Une nouvelle lecture du sous-sol du pôle Sud de Mars démonte une ancienne théorie et ouvre une autre voie pour comprendre ce que la glace cache réellement.

Pendant des années, un signal lumineux provenant de l’extrême sud de Mars a alimenté l’hypothèse d’un réservoir d’eau liquide caché sous des kilomètres de glace. Cette idée a stimulé l’imagination scientifique, car toute trace d’eau sur un autre monde s’accompagne généralement de l’éternelle question : et s’il y avait de la vie ? Désormais, une analyse récente obtenue grâce à une manœuvre inhabituelle d’un orbiteur de la NASA change complètement le scénario.
Le protagoniste est le Mars Reconnaissance Orbiter (MRO), un vaisseau spatial qui cartographie depuis longtemps la planète rouge avec la patience d’un archéologue céleste. Son radar SHARAD n’avait jamais réussi à voir clairement la zone où, en 2018, un autre radar, le MARSIS de l’Agence spatiale européenne, avait enregistré un signal étonnamment fort.
C’est un instrument de radar de subsurface installé sur le Mars Reconnaissance Orbiter (MRO). Sa mission est de cartographier le sous-sol peu profond de Mars en envoyant des impulsions radar et en détectant leurs réflexions.
Il a une résolution d’environ 15 mètres et peut sonder jusqu’à plusieurs centaines de mètres de profondeur, fournissant des données sur la composition des couches du sous-sol, notamment la glace, la roche et le sol.
L’équipe américaine a donc décidé de tenter une rotation extrême du vaisseau spatial pour forcer l’instrument à observer sous un angle différent. Cette audace technique a fini par démonter l’idée du lac.
Une manœuvre risquée pour observer en profondeur
Pour comprendre ce qui s’est passé, il faut imaginer le MRO pivotant sur lui-même de 120 degrés, une rotation inhabituelle qui place sa structure dans une position inconfortable mais nécessaire. L’antenne radar, située à l’arrière, est normalement en partie masquée par le corps même de l’orbiteur, ce qui réduit sa sensibilité. Les ingénieurs du Jet Propulsion Laboratory et de Lockheed Martin, après des mois de tests, ont conçu une série de commandes permettant cette rotation extrême sans compromettre la stabilité du vaisseau spatial.
Martian sand dunes captured in enhanced color by NASA's Mars Reconnaissance Orbiter in July. MRO has sent home almost 500 Terabits of science data about the Red Planet's surface, weather, and potential landing sites.
— NASA Mars (@NASAMars) September 16, 2025
Happy #ITProDay to the teams who manage all that info! pic.twitter.com/PEdhaRV5ob
La manœuvre a porté ses fruits le 26 mai, lorsque le SHARAD a réussi pour la première fois à renvoyer un écho profond de la zone suspecte : une région d’environ 20 kilomètres située sous une plaque de glace de près d’un kilomètre et demi d’épaisseur. Le signal arrivé sur Terre n’avait rien à voir avec celui que le MARSIS avait enregistré il y a des années. Il était faible, presque un murmure.
Ce détail change tout. L’eau liquide réfléchit les ondes radar avec une intensité énorme, presque comme un flash. L’écho du SHARAD, en revanche, suggérait un matériau d’un autre type, moins réfléchissant et plus proche d’un mélange de poussière et de roche compacte.
« Depuis presque vingt ans, nous observions cette zone avec le SHARAD sans rien voir à de telles profondeurs », a rappelé Than Putzig, l’un des scientifiques de l’instrument SHARAD (Shallow Radar) de la MRO, avec Gareth Morgan. Lorsque, enfin, ils ont pu regarder sous le bon angle, ce qu’ils ont vu ne correspondait pas à l’idée d’un lac emprisonné sous la glace.
Ce que le MARSIS a vu… et ce qui s’y trouvait vraiment
Le signal lumineux détecté par le radar européen en 2018 avait été interprété comme la surface d’un plan d’eau. Pour étayer cette hypothèse, certains chercheurs avaient proposé qu’il s’agisse d’un lac salé, capable de rester liquide malgré les faibles températures du pôle Sud martien. L’explication tenait la route : le sel peut empêcher l’eau de geler même dans des environnements extrêmes. Mais tout le monde n’avait pas été convaincu.

La nouvelle étude introduit une autre possibilité. Le pôle Sud martien est rempli de cratères anciens recouverts de glace, créant une mosaïque de dépressions et de crêtes. Dans un paysage aussi irrégulier, une zone inhabituellement lisse pourrait produire un écho très fort sans nécessiter la présence d’eau. Un écoulement de lave solidifiée, par exemple, correspondrait bien à ce comportement.
Gareth Morgan le résume sans détour : « L’hypothèse du lac a engendré beaucoup de travail créatif, ce qui est précisément ce que toute découverte scientifique enthousiasmante doit provoquer. Cependant, les nouvelles données rendent très difficile de maintenir cette première interprétation. Un second passage radar avec la même technique n’a même pas détecté le faible signal précédent, ce qui suggère un phénomène local qui ne se comporte pas comme un lac stable ».
Nouveaux objectifs : ce que le radar peut désormais révéler
Même si l’idée du lac s’estompe, l’avancée technique ouvre de nouvelles perspectives. L’équipe elle-même est impatiente d’appliquer ces rotations extrêmes dans des zones où le radar a toujours rencontré des difficultés. La première est la Fossa Medusae, une région équatoriale pleine de mystères. Certains pensent qu’il s’agit d’un immense dépôt de cendres compactées ; d’autres croient qu’elle pourrait dissimuler de vastes réservoirs de glace en profondeur.

Si cette glace existe, elle constituerait une ressource stratégique pour de futurs voyageurs humains, puisque la zone reçoit davantage de lumière et maintient des températures moins extrêmes. « Si c’est de la glace, nous aurions un immense réservoir d’eau près de l’équateur martien, exactement là où il serait idéal d’envoyer des humains », explique Putzig
Entre-temps, la MRO poursuit sa routine autour de la planète, collectant des données pour comprendre l’histoire géologique de Mars avec un niveau de détail impossible à obtenir depuis la surface. Le vaisseau spatial, géré par le JPL pour la NASA et équipé d’un radar fourni par l’Agence spatiale italienne, continue d’étendre la cartographie de ce qui se cache sous la glace, les dunes et les roches.